Reconstitution des milieux de sédimentation - Sainte-Honorine-des -Pertes et Port-en-Bessin (Calvados)
Source bibliographique : "Jurassique des Côtes du Calvados", O. Dugué, G. Fily et M. Rioult
- Université de Caen - 1997

A la fin de l’Aalénien et au début du Bajocien, les calcaires silteux et glauconieux de la Malière se déposent sur la bordure orientale du bloc armoricain. Le milieu de sédimentation s’approfondit (hausse relative du niveau marin comme l’atteste l’abondance de la glauconie) les apports sédimentaires diminuent et la sédimentation ralentit (bioturbation intense). Alors que le niveau marin est à son maximum, le ravinement des calcaires du sommet de la Malière modèle une surface d’érosion irrégulière, la Surface de Sainte-Honorine 1 ; la Couche verte, constituée par les produits du remaniement de la Malière enrobés de sédiments carbonatés, remplit les anfractuosités et recouvre cette surface. Elle est ravinée à son tour et tronquée par la Surface de Sainte-Honorine 2.
Le ralentissement de la sédimentation observé pendant la fin du dépôt de la Malière s’accentue au cours de la période de sédimentation très condensée de la Formation de l’Oolithe ferrugineuse de Bayeux, caractérisée par sa grande richesse en fer. Le taux de sédimentation est très faible : après compaction et diagenèse, 0,50 m (ou moins) de dépôts ferrugineux et de calcaire pour 13 sous-zones d’ammonites du Bajocien inférieur et supérieur. Le milieu de dépôt, dépourvu d’apports détritiques et peuplé de céphalopodes, est éloigné du rivage, en domaine marin distal.
A la base de la formation (Conglomérat de BayeuxBajocien inférieur), des oncolithes ferrugineux, formés par précipitation du fer autour d’éléments remaniés des couches sous-jacentes, ont été roulés sur le fond dans un milieu de forte énergie. C’est dans un milieu plus calme que se sont développés les stromatolithes ; ces derniers ont été construits grâce à l’activité de cyanobactéries, microorganismes réalisant la photosynthèse, dans la zone photique, donc dans des conditions proches de l’émersion. De telles conditions pouvaient être réalisées dans une zone de haut-fond éloignée des côtes armoricaines.
Au début du Bajocien supérieur, pendant le dépôt de l’Oolithe ferrugineuse de Bayeux proprement dite, la tranche d’eau augmente (le milieu s’approfondit) ; la sédimentation biochimique est prédominante avec la formation d’oolithes par précipitation de carbonate de calcium et de fer autour de nucleus de petite taille ; l’abondance des oolithes indique que l’énergie du milieu est importante.
Vers la fin du dépôt de l’Oolithe ferrugineuse, l’énergie du milieu diminue, les oolithes sont moins abondantes et le sédiment carbonaté est envahi par des animaux fouisseurs.
A la fin du Bajocien supérieur, après un arrêt de sédimentation matérialisé par la Surface de Sainte-Honorine 4, il y a reprise et accélération de la sédimentation avec le dépôt du Calcaire à spongiaires qui s’étend du Cotentin à la Baie de Seine en passant par la Campagne de Caen. Le taux de sédimentation est élevé : après compaction et diagenèse, une dizaine de mètres de calcaires pour une seule sous-zone d’ammonites, (sous-zone à Bomfordi, dernière sous-zone du Bajocien). Les carbonates se déposent en milieu peu profond sur un fond soumis à l’action des vagues de tempêtes, peuplé par une abondante faune benthique (brachiopodes, oursins, serpules, bryozoaires) dominée par les éponges. Ainsi se construit une première ébauche de plate-forme carbonatée à prairies d’éponges analogues à celles du plateau actuel des Bahamas.
Au Bathonien inférieur, après une lacune sédimentaire située au sommet du Bajocien matérialisée par la Surface de Port 1, se met en place une sédimentation plus lente, avec le dépôt des calcaires argileux bioturbés des Couches de passage, dans une mer plus profonde, à Céphalopodes, hors d’atteinte de l’action des houles de tempêtes.
Après cet épisode de sédimentation condensée terminé par la Surface de Port 2, la sédimentation change brutalement avec le dépôt des Marnes de Port-en-Bessin ; le taux de sédimentation augmente rapidement dès la base, avec un apport important de terrigènes en relation avec le Sillon marneux. Cette sédimentation abondante aboutira au développement d’une formation marno-calcaire de 35 à 45 m d’épaisseur. Le milieu de dépôt reste assez profond ; d’une part, il est situé sous la limite d’action des houles permanentes, ce qui permet la décantation des fines particules argileuses (futures couches de marnes grises); d’autre part il subit épisodiquement l’action des houles de tempêtes, responsables des épandages épisodiques de sables fins et de débris de coquilles fournis par une faune benthique peuplant les secteurs plus proches du rivage (futures couches calcaires).

Reconstitution des milieux de sédimentation - Sainte-Honorine-des -Pertes et Port-en-Bessin (Calvados)
Source bibliographique : "Jurassique des Côtes du Calvados", O. Dugué, G. Fily et M. Rioult
- Université de Caen - 1997