Synthèse géologique - Site de Fresville (Manche)


Reconstitution de l’histoire géologique du Cotentin et du secteur de Fresville
au cours du Mésozoïque et du Cénozoïque

A la fin du Paléozoïque, au Permien, le Cotentin est émergé ; il appartient au continent armoricain constitué par les reliefs résiduels de la chaine varisque soumise à une érosion intense. Le climat est chaud et aride.

Au début du Mésozoïque, au Trias (250 Ma), l’érosion se poursuit et aplanit les reliefs. Le Cotentin est alors drainé par un réseau fluviatile qui coule du Sud vers le Nord et qui accumule des cailloutis, des sables et des argiles dans les creux de la surface post-varisque.
Au Lias (Jurassique inférieur), la mer envahit progressivement la bordure nord-est du continent armoricain au cours d’une succession de cycles de transgression/régression qui se poursuivront pendant tout le Jurassique. 
Tout d’abord, à l’Hettangien (200 Ma), la mer, venue de la trouée de la Manche,  remonte l’ancien réseau fluviatile triasique du Nord vers le Sud et forme le golfe du Cotentin recouvrant l’Est du Cotentin et l’extrémité ouest du Bessin. La sédimentation, essentiellement carbonatée, est caractéristique d'un milieu littoral aux eaux chaudes et agitées (Calcaire d'Osmanville ou Calcaire de Valognes).

La transgression se poursuit au Sinémurien (190 Ma) ; elle est amplifiée par un basculement de la bordure armoricaine vers le Nord. Le  golfe du Cotentin s’élargit vers le Sud et vers l’Est (Bessin) et le milieu de sédimentation devient plus terrigène et moins littoral : dans une mer calme à fond vaseux se déposent les marnes et les calcaires de la Formation du Calcaire à gryphées. La faune est dominée par les mollusques bivalves filtreurs tels que les gryphées ou fouisseurs tels que les Pleuromya et Pholadomya, associés à des échinodermes et brachiopodes. Les prédateurs sont représentés essentiellement par les céphalopodes (ammonites et bélemnites). Le plancton à test calcaire, épisodiquement très abondant, contribue à la sédimentation carbonatée.
La subssidence du fond marin permet une accumulation importante de marnes et calcaires, avec un maximum d’épaisseur dans le bassin de Ste-Mère-Eglise (100 m d’épaisseur totale).
La mer couvre alors la partie anglo-normande du Bassin parisien ; on retrouve les mêmes dépôts marno-calcaires sinémuriens dans le Sud-Ouest de l’Angleterre à Lyme-Régis, sur la « Jurassic Coast ». La mer communique à l’Ouest avec le proto-Atlantique, par la trouée de la Manche, et au Nord avec le rift de la mer du Nord.

La transgression s’amplifie au cours du Lias, au Pliensbachien et au Toarcien, et la mer envahit l’ensemble du Bassin parisien.
A la fin du Jurassique, la mer se retire du Cotentin et de la Basse-Normandie ; il y a émersion généralisée du Bassin parisien. Le Cotentin reste émergé pendant tout le Crétacé inférieur (jusqu’à l’Albien) : la couverture jurassique est érodée puis recouverte par des sols argileux (dépôts continentaux wealdiens).
Au Crétacé supérieur (Cénomanien), la mer envahit à nouveau le Bassin parisien : c’est le début de la transgression marine crétacée, d’importance mondiale, liée à une montée des eaux généralisée. Dans le Cotentin, sur le rivage armoricain, ce retour de la mer se manifeste par le dépôt des sables à glauconie appartenant à la Formation des Grès verts à orbitolines (foraminifères). Loin du rivage, vers l’Est (de Hennequeville à Honfleur, et au Havre), la mer du Bassin de Paris dépose les boues carbonatées qui sont à l’origine de la formation de la Craie glauconieuse.


La transgression s’amplifie au Cénomanien supérieur (95 Ma) : la mer de la craie occupe alors tout le Bassin parisien et ses bordures et dépose des boues carbonatées formées par accumulation des squelettes calcaires (coccolithes) du nanoplancton. Dans le Cotentin, il existe peu de dépôts marins crétacés : d’une part, il y a eu des lacunes de sédimentation ; d’autre part, les dépôts ont disparu par altération et érosion, laissant de rares témoins et des silex que l’on retrouve dans les sables fluviatiles pléistocènes et les cordons littoraux du Nord Cotentin.

Vers la fin du Crétacé, au Maestrichtien, la présence de la mer est attestée dans le Cotentin par le dépôt du Calcaire à Baculites anceps (ammonite déroulée), préservé dans les secteurs de Fresville et des rives du Merderet,
A la fin du Mésozoïque le BP subit une compression liée à la surrection des Pyrénées et des Alpes ; l’ensemble des terrains sédimentaires de la bordure occidentale du Bassin de Paris bascule légèrement vers le NE.

Au Cénozoïque, l’ensemble du Cotentin est émergé et soumis à un climat chaud ; la mer effectue des incursions sur le Centre-Cotentin et dépose des faluns (dépôts calcaires bioclastiques côtiers) ou des sables dont les rares témoins sont mal conservés (carrières remblayées) mais visibles en sondage.
Au Quaternaire, le Cotentin est soumis au refroidissement du climat dont les témoins sont les loess et les coulées de solifluxion des périodes froides et les plages fossiles étagées des périodes tempérées, visibles sur le littoral du Nord-Cotentin.

Sources bibliographiques :
Bulletin d’information des Géologues du Bassin de Paris volume 42 n°2 juin 2005
Synthèse géologique du Bassin de Paris  Mém. BRGM n°101 (1980)
Carte géologique de France à 1/50 000, notice des feuilles de Carentan et de Grandcamp-Maisy, BRGM

Cadre géodynamique

Au Lias, l'Europe du Nord-Ouest est soumise à un régime de tectonique distensive marquée par le début d'ouverture de l'océan atlantique.
Les terres émergées, dont le Massif armoricain, représentent des reliques de la Pangée, issue de l'orogenèse varisque, disloquée et aplanie par l’érosion.
La mer, qui envahit progressivement le bassin anglo-parisien, communique avec trois grandes zones de distension :
- au Nord-Ouest : l’océan Atlantique en formation, par l'intermédiaire des Approches Occidentales (trouée de la Manche)
- au Nord et au Nord-Est : le rift de la mer du Nord
- au Sud : le rift alpin (ouverture de l'océan alpin), dépendant de la Téthys, par l'intermédiaire du seuil de Bourgogne.

 

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